Socrates Brasileiro Sampaio de Sousa Vieira de Oliveira, communément nommé Sócrates, nait le 19 février 1954 à Belém, en Amazonie. Il commence sa carrière sportive en 1974 dans le club de Botafogo-SP. On le surnommera « le docteur » car le joueur était titulaire d’un doctorat en médecine. Il se spécialisera ensuite dans la médecine sportive et deviendra consultant.
Il est en outre le frère aîné du footballeur Raí Souza Vieira de Oliveira, surnommé Raí, qui fit les belles heures du Paris Saint-Germain dans les années 1990. Sócrates fait figure d’exception. En effet, il était rare à l’époque, et cela vaut toujours, qu’un sportif de haut niveau soit également diplômé d’une prestigieuse faculté, en l'occurrence, celle de San Paulo. Son engagement politique en faveur de la démocratie marquera l’histoire du football, du pays et du monde.
Ce milieu de terrain offensif a incarné avec Falcao et Zico les « Seleçaos » des Coupes du monde 1982 et 1986, en Espagne puis au Mexique. À l’époque, le capitaine brésilien portrait une barbe ; sa silhouette reconnaissable et son allure noble sur le terrain ne manquaient pas d’attirer l’œil. N’oublions pas de citer son fameux bandeau blanc… Des facilités techniques évidentes et une vision de jeu exceptionnelle ont fait de lui un remarquable ambassadeur créatif – partageant une conception poétique du football avec l’ensemble de l’équipe du sélectionneur Telê Santana.
Sócrates signe à la Fiorentina au printemps 1984, en série A. Les Italiens se souviennent de la performance du joueur au Mondial 1982 ; Brésil-Italie. Pourtant, malgré des statistiques encourageantes, l’équipe terminera à la neuvième place. Le footballeur retourne au Brésil, à Santos puis à Botafofo où il finira discrètement sa carrière en 1989, alors âgé de 35 ans.
En 2011, l’ancien joueur reconnaît publiquement souffrir d’alcoolisme. Il est admis le 20 août 2011 aux soins intensifs de l’hôpital de São Paulo suite à une hémorragie digestive ; le 6 septembre, il retourne à l’hôpital pour les mêmes symptômes. Il a une cirrhose et le 3 décembre 2011, l’hôpital Albert Einstein de São Paulo annonce par communiqué que l’état de l’ancien capitaine de la Seleção est très préoccupant. Sócrates décède le dimanche 4 décembre 2011 à l’âge de 57 ans. De son vivant, il avait affirmé qu’il préférerait mourir un dimanche, jour de victoire pour les Corinthians ; son souhait a été exaucé.
Vive la démocratie
Le joueur inscrit 172 buts en 297 matches étalés sur six années de jeu avec les SC Corinthians de San Paolo, équipe qu’il intègre en 1978. Sócrates entre dans la légende en remportant trois championnats paulistes (1979, 1982, 1983). Le capitaine brésilien totalisera 60 sélections et marquera 22 buts entre 1979 et 1986. Il deviendra leader de la démocratie corinthiane avec Walter Xasagrande, Zé Maria et Wladimir. Les Corinthians évoluent en deuxième division. La dictature militaire est en place.
La corruption est généralisée dans tout le pays et voici qu’une expérience est tentée par Sócrates, accompagné de quelques-uns de ses coéquipiers et d’un jeune sociologie contestataire, récemment sorti de prison. Un système d’autogestion par lequel chaque décision liée à la vie du club est votée par les joueurs. Une distribution qui s’avérera profitable ! « Nous voulions dépasser notre condition de simples joueurs-travailleurs pour participer pleinement à la stratégie d’ensemble du club. Cela nous a amenés à revoir les rapports joueurs-dirigeants. Les points d’intérêt collectif étaient soumis à la délibération », confiera Sócrates.
Au niveau sportif, les Corinthians remportent deux championnats à São Paulo. Sur le plan politique, la dictature n’a pas le pouvoir de s’opposer aux messages que les joueurs inscrivent sur leurs maillots en faveur de la démocratie. En 1983, l’équipe déploie, durant la finale de la Coupe du Brésil, une banderole sur laquelle les spectateurs et les téléspectateurs liront : « Gagner ou perdre, mais toujours la démocratie ». Les revendications corinthianes se feront moins nombreuses après le départ de plusieurs joueurs et le début de la transition démocratique. L'événement le plus marquant de cette période fut l'inscription résolue de la phrase « Je veux voter pour mon président » sur les maillots des joueurs. Cette initiative avait fortement dérangé la junte et marqua les esprits.
À l’époque, les joueurs exerçaient leur métier avec plus de joie, de liberté et de responsabilité. Ils avaient à cœur de lutter pour la démocratie et un pays meilleur ; profitant de leur couverture médiatique pour partager avec le plus grand nombre des messages politiques puissants, dans un climat favorable qui leur donna la force d’exprimer collectivement leurs revendications et leur art.
Son style de jeu
Considéré comme l’un des plus grands joueurs de l’histoire du football brésilien, Sócrates était un excellent tacticien – qui faisait preuve d’une grande technicité. Porté vers l’offensive, le célèbre milieu de terrain déclarait en Toscane, lors de son arrivée à la Fiorentina en 1984 : « Ma principale qualité est de me mettre au service du collectif, mais pour ce faire, je dois convaincre les autres que je suis utile ».
Pour justifier son départ, un an plus tard, il expliqua que son physique n’était pas habitué à des entraînements aussi intenses. Qu’au Brésil, les systèmes de jeu sont nettement différents. Qu’on obtient une excellente forme en jouant. Que les mises au vert n’existent pas et qu’il n’y a pas de phases destructrices de préparation athlétique. Concernant son train de vie et ses consommations excessives de tabac et d’alcool, le joueur confiait qu’il avait toujours fumé, tout en sachant que cela était nocif et qu’il adorait la bière. Il affirmait que le football est un sport collectif qui ne nécessite pas que tout le monde coure ; qu’il y a ceux qui courent et ceux qui pensent…
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